Les Déviantes / Capucine Delattre (2020)

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Comme promis, je reviens vers vous avec la présentation de ce texte dont j’ai fait la sélection pour le prix Françoise Sagan.
Pourquoi ce choix ?

Les déviantes, de Capucine Delattre, évoque le changement de vie qui tombe sur Anastasia, une trentenaire tout ce qu’il y a de plus normal, qui découvre avec stupéfaction qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. En étant en avance sur tout le monde, y compris pour cette maladie qui touche les femmes surtout après 50 ans, cette nouvelle va la faire basculer dans un nouveau monde, un monde limité au prochain mois peut-être aux prochaines d’années, grand maximum. À partir de là elle va donc dévier de la vie qu’elle se prévoyait, et dans cette déviance elle va embarquer une de ses amies et sa nièce, pour d’autres raisons.


Ce qui m’a intéressée dans ce roman c’est l’écriture de Capucine Delattre, c’est sa manière de traiter par des phrases courtes mais percutantes, voire répétitives, les prises de conscience qui touchent les trois femmes dont elle raconte le destin. J’ai été estomaquée par la qualité de l’écriture, sa maîtrise, et j’ai été touchée par un certain nombre de phrases, des réflexions profondes, à travers ce texte court mais intense.

« Elle sera devenue une trouble-fête, une anomalie.
Mais peu lui importera.
Elle aura retrouvé autre chose.
Quelque chose de léger et de précieux, qu’on ne possède souvent qu’une fois dans sa vie, sans même en réaliser la valeur.
Une forme d’innocence.
De confiance béate et infantile en ce qui s’ensuivra.
Le goût des saccages. »

Par ailleurs, c’est seulement en refermant le roman que je me suis renseignée sur le texte et sur son autrice et que j’ai découvert que cette dernière n’avait que 19 ans. J’ai été donc d’autant plus impressionnée par cette maîtrise de l’écriture et surtout par la maturité de sa réflexion sur la vie, sur la mort, sur les différents aspects de ce qui fait qu’on est capable de vivre cette vie intensément jusqu’au bout.

Bref c’est un texte qui n’est pas exempt de défauts, quelques maladresses peut-être une petite lourdeur de style à certains moments. Néanmoins c’est un texte percutant qui ne peut laisser personne indifférent et qui questionne sur ses propres choix de vie et sur ce qu’on veut en faire. Comme le dit Lolita, 17 ans :

« j’ai peur de vivre, j’ai peur de mourir, j’ai peur que ma soeur meure, j’ai peur de me tromper, j’ai peur de me fâcher avec papa et maman, j’ai peur d’être d’accord avec eux, j’ai peur d’obéir, j’ai peur de ne plus jamais avoir de famille, j’ai peur d’avoir peur, j’ai peur que mes amis s’éloignent, j’ai peur qu’il soit déjà trop tard, j’ai peur de mes propres questions, j’ai peur de ne jamais être capable d’aimer, j’ai peur de ne pas savoir ce que je mérite, j’ai peur de ne rien mériter du tout, j’ai peur des injustices, j’ai peur…
-C’est normal d’avoir peur. Le tout c’est de ne pas te laisser paralyser. De ne rien attendre. Et surtout, de ne pas penser que tu mérites certaines choses, que tu n’en mérites pas d’autres.
Tu ne mérites rien. Personne ne te doit quoi que ce soit…. tu te mérites juste toi. Tu es ta seule certitude. Tu peux potentiellement tout perdre mais la seule personne à qui tu devras rendre des comptes, la seule qui pourra légitimement te faire des reproches ou des félicitations, c’est toi-même. »

Pour conclure, je ne sais pas si ce roman recevra le prix Françoise Sagan, mais il m’a semblé intéressant de le proposer et de laisser une vraie première chance à cette jeune autrice prometteuse qui, à coup sûr, fera entendre parler d’elle.

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